L'ondulation du pissenlit

sept-oct
EXPO

Hélène Boulanger, Présidente de l’Université de Lorraine
Nathalie Sevilla, Directrice de l’INSPÉ de Lorraine
Christophe Choserot, Maire de Maxéville
ont le plaisir de vous inviter à l’exposition 

L'ONDULATION DU PISSENLIT

par Hélène Bleys

- INAUGURATION
En présence de l’artiste, ouverte à toute personne intéressée.
Jeudi 19 septembre 2024 à 18h

- EXPOSITION
Du 19 septembre au 18 octobre 2024

- Visites libres : gratuites et sans réservation, du lundi au vendredi, de 8h à 17h.
- Visites commentées par une de nos médiatrices : gratuites et avec réservation sur Pretix https://pretix.eu/lepreau/


« Chez Hélène Bleys, la nature déraille et nous appelle : ses pièces, qui semblent tout droit sorties d’une rêverie psychotropique, nous font signe de les suivre – enfonçons-nous dans ces Mauvaises herbes et allons voir dans la clairière, là-bas, un peu plus loin... Les formes qu’elle nous propose pourraient proliférer à l’infini, et on leur soupçonne en effet une vie autonome et quelque peu perverse. [...] Le dessin et la matière conspirent pour nous souffler que peut-être, oui, peut-être, il existe un autre monde, inquiétant et magique, où nous croîtrions à l’envers, et où, d’adultes, les individus régresseraient en cocon, puis en pupe. Parce qu’il s’affranchit des cadres, le décoratif ensauvage la pensée, et l’ouvre au vent de l’étrange et de l’altérité. »

Susana Gállego Cuesta
Directrice du musée des Beaux-arts de Nancy 
(extraits de Prenez garde à l’eau qui dort. Hélène Bleys au Préau, 
à lire dans son intégralité en bas de cette page
).
Image

©Image Hélène Bleys

 

GALERIE LE PRÉAU :

UNIVERSITÉ DE LORRAINE
INSPÉ DE LORRAINE

5 rue Paul Richard à Maxéville
03 72 74 22 00 / LUN-VEN 8H-17H

http://u2l.fr/lepreau
inspe-culture-contact@univ-lorraine.fr

Avec le soutien de la DRAC Grand Est et la ville de Maxéville.

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Prenez garde à l’eau qui dort. Hélène Bleys au Préau

par Susana Gállego Cuesta
Directrice du musée des Beaux-arts de Nancy

 

"I do not want art for a few, any more than education for a few, or freedom for a few."

William Morris, 1877

Lorsque William Morris (1834-1896) donne sa conférence "The Decorative Arts" à Londres, le 4 décembre 1877, devant la Trades Guild of Learning, une association d'artisans qui se mobilise pour le renouvellement de l'apprentissage artistique, il est déjà une personnalité influente. Poète, dessinateur, conférencier, peintre, designer, il est connu pour son engagement libertaire et pour ses idées radicales sur le rôle que peut jouer l'art dans l'émancipation de l'humanité. Il s'exprime pourtant à une période où les prises de position contre "le décoratif" sont d'une violence surprenante. Le modernisme occidental qui se développe alors est résolument anti-décoratif ; son influence aura été telle dans la pensée de l'art des Xxe et XXIe siècle, que le mot même de "décoratif" est presque devenu une insulte, opérante encore aujourd'hui : n'est-ce pas le meilleur moyen pour disqualifier une oeuvre d'art que de dire d'elle qu'elle est décorative (sous-entendu: creuse et sans cervelle, juste bonne pour faire joli au-dessus du canapé du salon)? Et pourtant, depuis William Morris, la veine décorative de l'art n'est pas morte, et quelques artistes, assez folles et assez fous pour s'inscrire dans la filiation intellectuelle du Britannique, s'en revendiqueraient même ! C'est le cas d'Hélène Bleys qui, dans son exposition L'ondulation du pissenlit, nous propose une démonstration en acte de la puissance du décoratif.

Est-ce parce que le décoratif est étroitement lié aux périphéries sociales menaçantes que sont le populaire, le féminin et le sauvage, qu'il est si lourdement condamné par les élites avant-gardistes? Tout ce qui s'écarte de la droite ligne, de la verticalité mâle et dominatrice, ne peut en effet qu'être suspect... En donnant toute la place dans sa création à la ligne serpentine, aux errances du geste graphique, et aux séductions de la matière (dessinatrice hors pair, Hélène Bleys est aussi une céramiste aguerrie et inventive), l'artiste nous invite à une petite flânerie qui n'a rien d'innocent. Ses oeuvres, en bonne mauvaise graine, perturbent et déplacent, chahutent et détournent – mais qu'est-ce qui est ainsi poussé à bout? Sans doute notre vision trop souvent lisse et lénifiante du vivant, que nous voudrions pouvoir tenir en respect, à défaut de pouvoir le dominer...

Chez Hélène Bleys, la nature déraille et nous appelle : ses pièces, qui semblent tout droit sorties d'une rêverie psychotropique, nous font signe de les suivre – enfonçons-nous dans ces Mauvaises herbes et allons voir dans la clairière, là-bas, un peu plus loin... Les formes qu'elle nous propose pourraient proliférer à l'infini, et on leur soupçonne en effet une vie autonome et quelque peu perverse. Ses Tentatives de retour au cocon sont une ode à la beauté de l'émaillage, mais elles nous suggèrent aussi une réalité mutante. Chez Hélène Bleys, le dessin et la matière conspirent pour nous souffler que peut-être, oui, peut-être, il existe un autre monde, inquiétant et magique, où nous croîtrions à l'envers, et où, d'adultes, les individus régresseraient en cocon, puis en pupe. Parce qu'il s'affranchit des cadres, le décoratif ensauvage la pensée, et l'ouvre au vent de l'étrange et de l'altérité. L'artiste s'est choisi le dessin comme technique matricielle, et même quand elle dispose ses brindilles de céramique dans son installation Ménage de printemps, elle agence et réagence des lignes en un ductus reconnaissable entre mille.

Hélène Bleys se méfie des injonctions et de l'esprit de sérieux. Venue à l'art en gardant son regard d'enfant – et tous les enfants ont une prédisposition à être, comme le disait Sigmund Freud, des pervers polymorphes –  l'artiste nous convie à nous laisser surprendre. Mais prenez garde à l'eau qui dort...